Arrêt des néonicotinoïdes : la tolérance génétique, une alternative pour lutter contre la Jaunisse Nanisante de l'Orge (JNO)

11.05.2020

Virus transmis par les pucerons à l’automne (principalement Rhopalosiphum padi), la jaunisse nanisante de l’orge peut engendrer des pertes de rendement importantes. Sur l’orge, espèce la plus sensible à ce virus, les pertes peuvent atteindre 80 % dans les situations favorables au développement de la maladie. L’interdiction à l’automne 2018 de l’imidaclopride en traitement de semences, moyen de lutte le plus efficace, oblige désormais à se tourner vers des solutions alternatives. Dans cet article, nous vous proposons de revenir sur les différents leviers existants.

La lutte génétique

La voie génétique repose sur le choix de variétés tolérantes à la JNO. Ces variétés subissent les mêmes infestations de pucerons que les variétés sensibles mais l’infection virale s’exprime beaucoup moins. La tolérance est non totale mais néanmoins robuste. En situation de fortes expositions aux pucerons, la perte de rendement, sans être nulle, est nettement plus faible que celle observée avec des variétés sensibles (figure 1). Une surveillance des parcelles reste donc nécessaire mais l’utilisation de ces variétés permet de limiter les traitements insecticides. Les seuils de déclenchement de traitement insecticide sont en effet plus élevés. Arvalis ne recommande d’intervenir qu’en cas de présence de pucerons sur plus de 20-25% des plantes. Dans le contexte de réduction des pesticides du plan Ecophyto II, le choix de ces variétés tolérantes est un levier d’action très précieux.

Figure 1 : Comparaison de rendements et gains acquis avec la lutte insecticide selon différentes pressions de JNO, entre une variété d’escourgeon sensible et une variété tolérante (regroupement 15 essais, campagne 2014-2018) – Source ARVALIS

Figure 1 : Comparaison de rendements et gains acquis avec la lutte insecticide selon différentes pressions de JNO, entre une variété d’escourgeon sensible et une variété tolérante (regroupement 15 essais, campagne 2014-2018) – Source ARVALIS

La tolérance JNO des variétés actuellement disponibles sur le marché provient de l’introgression d’un gène de résistance (Ryd2) à partir de matériel éthiopien. Les deux premières variétés inscrites possédant ce gène ont été Naturel en1998 et Atenon en 2005. Cependant, leurs performances agronomiques n’étaient pas suffisantes pour qu’elles puissent avoir un réel développement. Les premières qui ont connu un développement significatif sur le marché sont deux variétés issues de notre programme de recherche KWS Momont : AMISTAR en 2013 et DOMINO en 2015. La création de variétés performantes intégrant ce gène est un axe stratégique depuis plusieurs années pour nos équipes de sélection. Des travaux qui nous permettent aujourd’hui d’avoir une gamme complète et une position de leader sur ce marché.Une gamme qui s’est élargie fortement ces dernières années avec l’inscription en 2017 de KWS BORRELLY, en 2018 de KWS JAGUAR, en 2019 de KWS JOYAU et KWS FILANTE, et 2020 de KWS EXQUIS et KWS FEERIS, et cet automne de KWS VOLCANIS.

Comme pour la lutte phytosanitaire, la possibilité de contournement par le virus doit être prise en compte. Afin d’augmenter cette durabilité de la tolérance, les travaux de nos équipes de recherche se concentrent aujourd’hui sur l’introgression cumulée de plusieurs gènes de tolérance à la JNO. Par ailleurs, si ces variétés sont une alternative très intéressante vis-à-vis de la JNO, elles ne permettent pas de contrôler la maladie des pieds chétifs transmises par les cicadelles. Là aussi, des gènes ont été identifiés et l’intégration de cette tolérance est en cours dans notre programme de sélection.

Les mesures agronomiques préventives

Le premier levier agronomique s’appuie notamment sur la destruction, avant les semis, des repousses et des graminées sauvages. La présence de ces plantes réservoirs à virus et hébergeant des pucerons à proximité des futures parcelles d’orge vient accroitre le risque d’infestation et d’infection virale.

Le recul de la date de semis permet de réduire le risque de concomitance accrue entre la période de forte sensibilité de l’orge (de la levée au stade 3 feuilles) et les activités de vol et de colonisation des pucerons. Mais retarder le semis ne constitue pas toujours une mesure pleinement efficace, notamment en cas d’automne doux et prolongé (comme à l’automne 2015).

La lutte phytosanitaire

En absence de matières actives capables d’agir sur le virus, la protection phytosanitaire est orientée contre les pucerons à l’aide d’insecticides à base de pyréthrinoïde. Ces insecticides agissent par contact avec une persistance d’actions de 10 à 15 jours et sans protection pour les nouvelles feuilles formées après traitement. Un renouvellement d’application sera donc nécessaire en cas de présence prolongées des pucerons. La mise en œuvre de cette lutte nécessite donc une surveillance régulière des parcelles dès la levée de la culture. En effet, en cas de mauvais positionnement du traitement, trop précoce ou trop tardif par rapport à la présence de pucerons, l’efficacité sera réduite voire nulle. Arvalis recommande d’intervenir si 10% des plantes sont colonisées ou si la présence de pucerons est supérieure à 10 jours.

La sélection des mécanismes de résistance pouvant être très rapide chez les pucerons en raison de leur énorme potentiel démographique, le risque d’apparition de résistance ne doit pas être négligé.

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